Louis ressent toujours les même sentiments, les même inquiétudes lorsque vient le moment pour lui de retrouver Eleanor Calder. C’est le même disque qui passe continuellement dans son esprit. Des notes mélancoliques, quelques accrochages à la manière de doigts qui manquent les touches d’un clavier et surtout, de belles paroles stéréotypées. Comme chaque chanson, celle-ci a ses sous-titres, son interprétation. Celle-ci est une mélodie d’amour, un amour fraternel. Elle raconte l’histoire d’un garçon qui pour l’amour qu’il porte à un autre, décide de se sacrifier. Il n’a pas eu le choix mais, cela ne change rien. Il a beau essayer, un peu plus ardemment à chaque fois, il reste l’ombre de lui-même. Et c’est cette ombre qui hante les rues des grandes villes du Monde, c’est cette ombre qui vole des baisers papillons au spectre qui l’accompagne.

                Il s’observe une dernière fois dans le miroir plein pied de sa chambre et bien vite une grimace prend place sur son joli visage. Malgré le temps qui passe, malgré ses centaines de groupies, il a toujours autant de mal à se confronter à son propre physique. Il essaye. Son engouement particulier pour les marinières en est une preuve, il sait qu’elles le mettent en valeur. Sans parler du fait qu’elles sont à la mode. Pourtant lorsque son regard bleuté se porte sur son reflet, il ne peut s’empêcher de penser que sa tenue, aussi harmonieuse soit-elle entre son t-shirt rayé blanc et son short d’un rose saumon presque délavé, aurait mieux rendu sur un mannequin en plastique dans une vitrine de magasin. Il soupire, résigné et quitte la pièce à reculons. Il tourne les yeux vers la porte de la chambre de son ami et colocataire. Celui-ci dort toujours. Probablement pour se remettre de l’une de ses nouvelles nuits de folies, ne peut-il s’empêcher de penser, du vague à l’âme.

                Il quitte leur suite sans un regard en arrière. Il se sent plus fébrile qu’à l’ordinaire lorsque ses yeux se posent sur la silhouette d’Eleanor. Il agit par pur automatisme. Lorsque leurs lèvres se frôlent, il ferme les yeux et souhaite du plus profond de son cœur, apprécier ce moment. Que quelque chose change en lui. Mais, comme toujours, rien ne vient. Alors, il ouvre les yeux et se plongent dans les deux orbes vertes de la jeune femme. Il ne sait pas pourquoi mais, ses yeux sont la seule chose qui le rassure. Une part de lui les aime. Ils veillent sur lui. Ils ressemblent un peu à ceux d’Harry. Elle le sort de sa contemplation en le saluant et il lui répond d’un simple signe de tête, l’esprit ailleurs. Ce n’est que lorsqu’ils pénètrent dans le hall qu’il s’oblige à se concentrer. De nombreux fans et autres journalistes attendent derrière les vitres. Les flashs crépitent déjà. « Alors, on fait quoi aujourd’hui ? », l’interroge-t-elle. Il se tourne vers elle et lui sourit gentiment lorsqu’elle s’accroche à lui. Il est persuadé qu’elle est bien plus forte que lui, mentalement parlant, pourtant lorsqu’elle se montre ainsi hésitante, il ne peut s’empêcher de vouloir la protéger. La rassurer. Il ne l’aime peut-être pas d’un amour incommensurable et ne peut s’empêcher de se méfier d’elle mais, une partie de lui c’est tout de même attachée à ce petit bout de femme. Il caresse sa main de son pouce, dans un geste tendre pour l’aider à se relaxer, lançant un regard mélancolique sur leurs mains liées, avant de finalement relever les yeux vers elle. « C’est une surprise. », dit-il tout en souriant le plus joyeusement que son état d’esprit lui permet : « Mais en gros, nous allons faire un peu de shopping. ».

                Sur cette dernière phrase, il l’embrasse délicatement sur le front avant de l’entraîner vers la sortie. A peine ont-ils franchi le seuil de l’hôtel que les fans se mettent à hurler : « Louiiiis ! », « Eleanooor ! », « Louaaanooor ! ». Louanor. Le couple le plus en vogue des One Direction ? L’oscar du meilleur mensonge people britannique ? – Les flashs les aveuglent et il enfile ses lunettes de soleil de sa main de libre. Les questions des journalistes commencent déjà à fuser mais, il ne les écoute pas, se contentant de traverser la foule avec l’aide non-négligeable de Paul, leur garde du corps – et accessoirement manager, un employé de Modest !. Il s’arrête à droit à gauche pour signer quelques autographes. S’il tient à s’éloigner, il ne veut pas non plus décevoir ses fans. Elles sont très importantes pour lui. L’une d’elle lui demande une photo, il accepte avec le sourire sans jamais lâcher la main de sa petite-amie… Que la jeune inconnue dévisage d’un air mauvais. Il comprend pourquoi en apercevant la pancarte « Larry Stylinson » quelle porte sous son bras. Il grimace. Louis voudrait disparaitre…

 « C’est une surprise. » D’ordinaire, je déteste les surprises car elles ne présentent que rarement de bonne chose. Mais j’ai bizarrement confiance en Lou. Peut-être parce que je sais qu’il me protège. Il le fait toujours. Il empêche que les choses m’atteignent trop directement, prêt à me boucher les oreilles si les insultes fusent, à me cacher les yeux devant les pancartes affichant trop clairement le mensonge de notre couple. Louis me protège. Et moi ? Qu’est-ce que je fais pour lui ? Avec toute l’ingratitude dont je suis capable, je me contente de profiter de mon statut pour en obtenir plus. Pourtant et même si je sais que je ne ressens aucun sentiment amoureux pour Louis – et ce n’est pas faute d’avoir essayé de rendre cette histoire réelle – je crois que j’éprouve une profonde affection pour lui. Et j’aimerais pouvoir l’aider en quelque chose de plus que ce que je m’évertue à faire. Ne jamais m’immiscer dans sa vie privé, ses pensées ne regardent que lui et s’il arrive qu’un jour il ait envie de m’en faire part, je serais toujours une oreille attentive. « Mais en gros, nous allons faire un peu de shopping. ». Ah ? Voilà quelque chose qui me parle ! C’est aussi un avantage certain à être la petite amie de Louis : le shopping parait irréellement simple. Rien n’est jamais au dessus de ses moyens. Et même si je ne suis vraiment pas là pour profiter de l’argent qu’il se fait grâce à sa carrière, je ne vais pas dire non s’il décide de payer ce qu’on trouve dans les magasins de vêtement. En fait, c’est une de mes activités favorite de l’accompagner faire son shopping, j’adore le conseiller et souvent, c’est dans ce genre de sortie que nous passons nos meilleurs moments. Ceux qui me paraissent les plus réels. Parce que c’est simple, mise à part quelques embrassades à quelques moments, nous pouvons aussi nous comporter comme deux amis, nous conseillant l’un l’autre sur quoi porter et comment mais surtout avec quoi et en quelle occasion ! D’ailleurs, je l’observe du coin de l’œil et ce petit bermuda rose lui va très bien. Et puis je ne fais pas prier pour observer les fesses que ça lui fait. On ne mentira à personne si on dit que les fesses de Louis sont parfaites et ce bermuda ne pourra pas prouver le contraire ! Je ne ressens absolument aucune gêne, quoi de plus normal ?

Et puis la comédie commence, nous traversons la foule et alors que Louis s’arrête pour signer des autographes à droite à gauche, je me camoufle derrière un masque de bienveillance et d’amour. Je le couve du regard, comme si je ne pouvais pas être plus fière de lui. Puis mes yeux tournent, un peu partout et quand ils se posent sur cette jeune fille et sa pancarte, je détourne le regard, comme si je n’avais pas vu, je me rapproche simplement un peu plus de Louis, ajustant ma position contre la sienne. Il bouge, je bouge. C’est un automatisme qui commence à s’encrer un peu trop en moi et qui me fait presque peur. Et si un jour je dois agir sans lui ? Qui me protégera ? Je chasse l’idée de ma tête d’un coup de main désinvolte mais imperceptible. Alors que l’on traverse encore un peu la foule, nous sommes bientôt libres, j’essaye de pas ne pas trop baisser la tête et de ne pas cacher mon visage avec ma main. Mais surtout, j’évite de sourire. Je ne veux pas attirer l’attention. Quelle image cela donnerait de moi ? Personne n’aurait réellement envie d’être ici. Tout à coup, la foule est moins dense et on peut enfin marcher sans être recroquevillé l’un sur l’autre. Je respire mieux, je prends quelques centimètres de distance avec Louis mais pour finalement revenir quelques secondes plus tard pour lui chuchoter à l’oreille : « Merci… Oh et on peut aller au starbucks avant ? » ça ne serait pas une vraie sortie louanor sans un passage obligatoire chez starckus. Avant de décoller mon visage du sien, je dépose un baiser sur sa joue, tout près de sa bouche. Naturellement. Finalement, je passe mon bras autour de sa taille et fait doucement glisser le sien sur mon épaule. C’est agréable d’être proche de lui, j’aurais pu tomber tellement plus mal que sur le doux et attentionné Louis Tomlinson. De temps à autre, mon pouce caresse sa hanche. J’ai l’impression d’avoir gagné des automatismes vraiment étrange. Qui ira remarquer ce genre de détail. Je me stoppe. Mes yeux s’attardent sur les boutiques. Je montre un sac du doigt : « Il est sympa non ? » C'est une distraction de base. Approche classique. Je cherche bizarrement mes mots, je n'arrive pas à communiquer avec lui aujourd'hui. Je crois que Louis s'éloigne de moi et ça me fait peur. Parce que je n'en ai pas fini avec la publicité que me procure cette relation. Mes yeux cherchent le premier Starbucks que l’on pourra trouver. J’ai chaud et particulièrement soif. Mais surtout, j’ai envie de me retrouver à l’abri de regard insistant pendant quelques instants. Bizarrement aujourd’hui, alors que Louis est un peu dans la lune, je suis moi-même mal à l’aise.